(Nouveaux) traitements, désir d’enfant, alimentation adaptée et partage d’expériences

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Quel est l’impact de la maladie de Crohn ou de la rectocolite sur votre vie ? Voici les témoignages d’un gastro-entérologue, une gynécologue et une diététicienne. Positifs, mais sans trop embellir la réalité.

Traitements : évolution et perspectives

Le gastro-entérologue Stijn Vanden Branden passe en revue les nouveaux traitements des vingt dernières années. Pour chaque type de traitement, il explique clairement à quel niveau du processus inflammatoire complexe ils agissent, comment ils sont administrés et quels sont leurs avantages et leurs inconvénients. Avec un message important : « Si ces traitements fonctionnent, il n’y a aucune raison de passer à un nouveau traitement. Ceux-ci ne sont une option que si votre traitement actuel ne fonctionne pas ou plus. »

Le mécanisme sous-jacent de la maladie de Crohn et de la rectocolite est un système immunitaire hyperactif. L’objectif des traitements actuels est de stopper cet emballement du système immunitaire. Et les traitements de dernière génération y parviennent très bien, affirme le Dr Vanden Branden. « Pour le moment, on applique la même approche à chaque patient. On commence par un traitement, puis on voit s’il fonctionne ou non. Mais chaque patient est différent, donc on perd parfois du temps avant de parvenir au bon traitement. À l’avenir, nous allons évoluer vers des traitements plus ciblés et adaptés au patient ; une médecine personnalisée. Cela permettra de trouver un traitement efficace beaucoup plus rapidement. »

Maladie de Crohn ou rectocolite et grossesse : l’importance d’un bon suivi

Que faire si vous avez la maladie de Crohn ou la rectocolite et que vous voulez avoir des enfants ? Mina Leyder, gynécologue spécialisée dans les grossesses à haut risque, et Veerle Mattens, gastro-entérologue, discutent de l’accompagnement idéal des patientes avant, pendant et après la grossesse.

Près d’une femme sur cinq atteinte de la maladie de Crohn ou d’une rectocolite décide de ne pas avoir d’enfants, et ce pour de multiples raisons. La Dre Leyder et la Dre Mattens rassurent les femmes qui doutent : « Si votre maladie est sous contrôle, vous avez de bonnes chances de vivre une conception, une grossesse et un accouchement sans problème. Pour que tout se déroule de manière optimale pour la mère comme pour l’enfant, la meilleure option est une approche multidisciplinaire par votre médecin et votre gynécologue. »

Docteur Mattens : « La plupart des femmes tombent enceintes entre 25 et 40 ans, et c’est justement pendant cette période que la maladie est la plus active. Il est donc primordial de bien accompagner les femmes avant, pendant et après la grossesse. »

Deux tiers des patientes qui étaient en rémission avant leur grossesse le restent pendant la grossesse. « Tout au long de la grossesse, votre corps subit de nombreux changements immunologiques, ce qui peut entraîner une poussée de la maladie. Mais c’est surtout le cas de patientes qui ne sont pas en rémission. »

Bien se tenir à son traitement : essentiel pour la mère et l’enfant

« Afin de mener à bien votre grossesse, il est important de suivre scrupuleusement le traitement qui vous a été prescrit. Discutez avec votre médecin du meilleur traitement à suivre en tant que femme enceinte. Car les médecins savent lesquels doivent être évités. Pour certains traitements récents, nous ne disposons pas encore de suffisamment de données pour pouvoir les considérer comme sûrs à 100 pour cent. »

« Interrompre un traitement sûr n’est pas une bonne idée ; les risques sont plus importants que les effets secondaires potentiels du médicament. Parlez-en avec votre médecin pour ne pas stresser par rapport à votre traitement pendant la grossesse. »

« 12 à 20 pour cent des patients ont des antécédents familiaux. D’ailleurs, le risque que votre enfant contracte également la maladie de Crohn est huit fois plus élevé. Dans le cas de la rectocolite, il est quatre fois plus élevé. Si les deux parents ont l’une de ces maladies intestinales chroniques, on monte à 30 pour cent. »

Suivi pendant la grossesse

« À l’OLV Aalst, nous optons pour une approche pluridisciplinaire afin de suivre au mieux les patientes enceintes. Nous surveillons de près la croissance du bébé, accordons une attention particulière au traitement et effectuons plus de prises de sang pour détecter des carences ou des caillots de sang. »

« Certains examens, comme les prises de sang et les échographies, se poursuivent pendant la grossesse. D’autres sont à éviter, comme les endoscopies. Nous soupesons toujours les risques : quel est le risque pour le bébé et quels sont les risques si nous n’effectuons pas certains examens ? »

Impact de la maladie de Crohn ou de la rectocolite sur la grossesse

La Dre Leyder l’admet : « Oui, il y a un risque accru de fausse couche, de naissance prématurée ou de césarienne. Les bébés sont plus susceptibles d’avoir un poids faible à la naissance, parce qu’ils n’arrivent pas à prendre suffisamment de poids pendant la grossesse. Les femmes atteintes d’une MICI courent également un risque plus élevé de diabète gestationnel. Si votre maladie de Crohn ou votre rectocolite ne sont pas sous contrôle, cela peut avoir un impact négatif sur le développement neurologique de l’enfant. » Face à ces risques, la Dre Leyder souligne une fois de plus l’importance de suivre correctement son traitement.

MICI et accouchement

 « Si vous êtes en rémission, un accouchement par voie vaginale est tout à fait possible. Si vous souffrez de fistules ou d’abcès, on recommande une césarienne. »

« Certains médicaments n’inhibent pas seulement votre propre système immunitaire, mais aussi celui de votre bébé », souligne la Dre Mattens. « Vous pouvez en tenir compte : si vous planifiez le traitement quelques semaines avant la date de l’accouchement, l’immunité de votre bébé fonctionnera à nouveau normalement à la naissance. »

Le médicament que vous prenez ne reste dans le sang du bébé que pendant une courte période : jusqu’à six mois après l’accouchement. « C’est pourquoi votre bébé ne devrait pas recevoir de vaccins vivants au cours de la première année. Ce qui n’est pas un problème en soi, car le calendrier de vaccination n’en prévoit justement qu’après un an. »

Récidive après l’accouchement

Après l’accouchement aussi, il est important de bien suivre votre traitement. « Environ 30 pour cent des mères ont une poussée de la maladie au cours de la première année après l’accouchement. C’est souvent le résultat d’un traitement adapté pendant ou après la grossesse. »

Maladie de Crohn ou rectocolite et allaitement

L’allaitement est bon pour votre bébé et son immunité. « Mais nous n’avons pas encore de preuves que la maladie de Crohn ou la rectocolite soient moins fréquentes chez les bébés allaités. De même, nous ignorons si l’allaitement maternel a un impact sur l’évolution de la maladie chez la mère. »

Alimentation et maladie de Crohn ou rectocolite

Anneleen De Pauw, diététicienne, est spécialisée dans les maladies intestinales chroniques. Cette experte est donc bien placée pour évoquer la relation compliquée entre alimentation et MICI. « Ce n’est pas un sujet facile, car il n’existe pas de régime miracle. Certains aliments sont tolérés par l’un et pas par d’autres. »

Suivez la pyramide alimentaire

C’est pourquoi elle renvoie aux bases d’un mode de vie sain. « Si vous êtes en rémission, optez pour une alimentation saine et variée. La nouvelle pyramide alimentaire est une bonne référence. « Mieux vaut éviter les aliments ultra-transformés, car ils sont pleins de graisses, de sucres et de sel. Chips et biscuits, boissons gazeuses, charcuterie, pizzas surgelées, plats préparés etc.

Les avantages des fibres

« Les patients en ont souvent peur, mais il est toujours important de manger des produits riches en fibres : légumes et fruits, légumineuses, pain et pâtes… Ils ont un effet bénéfique sur la paroi intestinale, assurent des taux de sucre constants dans le sang et abaissent le taux de cholestérol. Vérifiez toujours les emballages pour voir la quantité de fibres qu’ils contiennent. »

Les patients MICI ne tirent pas toujours suffisamment de vitamines et de minéraux de leur alimentation, justement parce qu’ils évitent les produits riches en fibres. « Vous pouvez éventuellement compenser par des compléments alimentaires si ce n’est pas possible par le biais de votre alimentation. »

Tenez un journal alimentaire

L’alimentation saine est un réel apprentissage pour de nombreux patients. « Dans la période après le diagnostic, il y a beaucoup de stress : qu’est-ce que je tolère ou pas ? En tenant un journal alimentaire, vous pourrez tirer des conclusions. Notez ce que vous mangez et en quelle quantité, quels symptômes ils provoquent et la fréquence de vos selles. »

Que manger en cas de poussée

Quand on a une poussée, l’alimentation est tout à fait différente. « Pour réduire vos symptômes, vous devrez peut-être passer à un régime pauvre en fibres pour apaiser vos intestins. Mieux vaut alors opter pour du pain blanc ou du riz blanc, au lieu des variantes complètes. »

Pour récupérer rapidement d’une poussée, il faut ingérer suffisamment de calories et de protéines. Ce n’est pas évident, alors Anneleen partage les conseils suivants : « Garnissez généreusement vos tartines et ajoutez de la margarine, remplacez les pommes de terre bouillies par de la purée au beurre et au lait, ajoutez toujours une garniture à votre soupe, comme des boulettes ou des croûtons, mangez du fromage ou des biscuits secs en guise d’en-cas. »

Vos poussées vous empêchent de manger régulièrement ? « Dans ce cas, envisagez une alimentation complémentaire temporaire. Pour ingérer un maximum de nutriments, je recommande toujours de boire des aliments liquides très lentement, en plusieurs heures. »

Comment remédier au surpoids ?

Un mode de vie sain implique une activité physique régulière. Mais les médicaments ou une fatigue extrême peuvent empêcher toute activité sportive. Alors parfois, on prend quelques kilos. Mais il est possible d’y remédier, sans que cela coûte trop d’efforts, affirme Anneleen. « Examinez vos habitudes alimentaires : quelque chose a changé récemment ? Là aussi, tenez un journal alimentaire pour découvrir ce qui est différent. Peut-être mangez-vous plus de collations que vous ne le pensez ? Essayez de bouger plus. Même des petits changements peuvent avoir un grand effet. Si vous passez beaucoup de temps en position assise, levez-vous régulièrement et faites un tour autour de votre bureau. »