Alimentation

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Alimentation et MICI… le sujet est compliqué. Tel patient est malade à cause des légumes crus, tel autre ne supporte pas les fruits de mer… Les problèmes diffèrent d’une personne à l’autre. Il n’existe rien qui puisse être considéré comme un régime MICI adapté à tous. Il vous arrive aussi parfois que les arbres vous cachent la forêt ? Ce dossier nous permet de remettre un peu d’ordre dans cette thématique.

Alimentation et MICI entretiennent une relation compliquée. De nombreux aliments ne sont pas tolérés en période d’activité inflammatoire de la maladie, mais aussi des patients en rémission ne supportent absolument pas certains aliments. En contrepartie, l’organisme d’un patient MICI a besoin d’un apport alimentaire supplémentaire en raison de la malabsorption ou de carences liées à sa maladie. Ceci rend complexe et frustrant le rapport à la nourriture chez ces patients. Les questions qu’ils se posent au quotidien sont les suivantes : « Comment conserver les nutriments nécessaires alors que vous devez aller aux toilettes jusqu’à 10 fois par jour ?

Quels aliments privilégier en cas de rechute ? Y-a-t-il un risque de déclencher une poussée suite à un excès alimentaire ? » Les nombreuses informations contradictoires ne facilitent pas les choses. Contrairement à certaines idées reçues, il n’existe aucune ligne directrice commune à chaque patient. La prise en charge doit être individuelle et discutée au cas par cas avec le gastroentérologue et, si possible, un diététicien. Dans tous les cas, il convient de s’adresser à un spécialiste et d’éviter les approches moins conventionnelles proposées par des praticiens non spécialistes de ces maladies.

Lien entre MICI et alimentation

Il n’existe aucune preuve clinique démontrant que la nourriture puisse être responsable de l’apparition d’une MICI.

Cependant, on estime, sur base de certaines études, que notre mode d’alimentation occidental (riche en graisses, en protéines, en conservateurs, mais pauvre en fruits et légumes) a un impact sur nos intestins. Une analyse menée sur 19 études fait apparaître que le risque d’être atteint de MICI est plus élevé si on consomme fréquemment des graisses saturées (présentes dans les graisses dures, les viandes grasses et les produits laitiers entiers) et des graisses polyinsaturées (acides gras oméga 6 présents dans le poisson, la viande et les œufs).

Les graisses saturées ont un impact sur la flore intestinale et peuvent causer une légère inflammation. Le risque diminue si vous mangez beaucoup de légumes, de fibres et de fruits. L’étude EpiCom (une étude menée auprès de 1560 patients MICI dans 31 pays européens) a montré par ailleurs que la consommation fréquente de sucre entraîne un risque plus élevé d’être atteint de MICI. Dans notre mode d’alimentation occidental, on constate principalement un manque d’oméga 3 (présents dans les graines, les noix et le poisson) et un excès d’oméga 6. Lorsqu’on sait que les oméga 3 freinent l’inflammation et que les oméga 6 stimulent celle-ci, on mesure l’impact de ce rapport pour un patient MICI.

Les aliments peuvent-ils provoquer une crise ?

Bien que, du point de vue du patient, l’alimentation et le régime jouent un rôle important dans la MICI, il n’existe actuellement aucune preuve clinique démontrant qu’un aliment particulier puisse provoquer une crise. Une alimentation déséquilibrée est monnaie courante chez les patients MICI. En effet, même en rémission, les patients gardent une « sensibilité digestive » inexplicable les obligeant à limiter la consommation de certains aliments. En cas de crise, l’inflammation intestinale rend la digestion globale difficile, en particulier celle des fibres et des matières grasses. Dans un cas comme dans l’autre, les patients tendent à privilégier les aliments « faciles à digérer » et donc excluent généralement les fibres ou réduisent le volume, voire même suppriment des repas afin de réduire leurs symptômes. Ce type de comportement est plus fréquent dans la maladie de Crohn que dans la rectocolite. Il convient de trouver un régime adapté à chaque patient, respectant les intolérances individuelles, tout en évitant les carences liées à des restrictions trop sévères et non justifiées.

Que faire en cas d’alimentation carencée ?

Les symptômes des MICI, comme la diarrhée et les douleurs abdominales, peuvent avoir un impact sur l’appétit et l’apport en nutriments. Non seulement il se peut qu’un patient souffrant de MICI mange moins qu’un individu bien portant, mais en outre la diarrhée entraîne la perte de nombreuses substances, telles que les nutriments, les protéines, les électrolytes et les fluides.

Dans le même temps, une inflammation de l’intestin peut conduire à une diminution de l’absorption de substances, ce qui renforce le risque de carences. Ainsi, on constate un manque de protéines chez 85% des patients MICI. Et tout aussi fréquemment une pénurie de vitamines et de minéraux essentiels, tels que les vitamines D, B12, K, A, le fer, le calcium ainsi que le magnésium. L’anémie touche deux tiers des patients MICI, en raison d’une carence en fer et en vitamine B12. Dans une moindre mesure, on constate également une carence en zinc (15%), liée au degré d’inflammation.

Ces carences ont bien entendu des conséquences : la perte de poids et de masse musculaire, la réduction de la densité osseuse et l’ostéoporose sont les plus fréquentes. Ces conséquences peuvent également être renforcées par d’autres facteurs tels que la prise de certains médicaments, le tabagisme et le manque d’exercice. Pour les patients atteints de ‘malnutrition’, il est important d’améliorer l’état nutritionnel et de contrôler l’équilibre des fluides, des minéraux et des électrolytes. Cela peut se faire en mangeant régulièrement de petites quantités, en corrigeant les carences à l’aide de compléments vitaminiques et en privilégiant un régime équilibré à l’aide d’un diététicien.

Un régime MICI sain

Pendant les périodes de rémission, un régime varié est essentiel. En cas de problèmes spécifiques, comme l’intolérance au lactose, un grêle court ou une malabsorption des sels biliaires (liés à des opérations répétées), il s’agit de prévoir des produits de substitution nourrissants. Ne supprimez donc jamais simplement un aliment de votre régime. Surtout dans un cas d’intolérance au lactose, il est essentiel de consommer toujours suffisamment de calcium et de vitamine D. Si vous n’avez pas d’intolérances particulières, les directives suivantes peuvent constituer un bon guide pour votre alimentation quotidienne.

Nous nous basons sur la nouvelle pyramide alimentaire, en mettant l’accent sur les aliments frais et une base solide d’aliments végétaux. Qu’est-ce que cela implique concrètement ? Boire beaucoup d’eau, manger des légumes et des céréales, un morceau de fruit comme collation, des aliments riches en calcium comme le yaourt et la maquée, complétés de protéines maigres. La viande rouge, les aliments transformés tels que les plats cuisinés et les aliments riches en sucre comme les bonbons, les pâtisseries et les gâteaux, doivent être évités autant que possible. S’il existe certains produits que vous ne tolérez vraiment pas, évitez absolument de les manger, cela va de soi.

Que faire en cas de crise ?

Lors d’une crise, il est essentiel de répartir vos repas et de consommer suffisamment de liquide. Mieux vaut éviter les légumes difficiles à digérer, tels que l’oignon, l’ail, le chou, les tomates et les haricots, et aussi l’alcool. Les produits laitiers également peuvent être source d’inconfort même s’ils sont bien tolérés habituellement. Ils peuvent être à l’origine de maux de ventre et de flatulences et aggraver les diarrhées. Mangez des légumes cuits à la vapeur et épluchés. Par ailleurs, une soupe ou un bouillon de légumes enrichi vous apporte également les nutriments nécessaires. Lors d’une crise, vous pouvez remplacer les fruits riches en fibres par des fruits épluchés et pauvres en fibres tels que le melon, ou par des fruits cuits à la vapeur. Pour les produits céréaliers, choisissez un pain léger sans trop de graines comme le pain d’épeautre. Pain grillé, farine d’avoine et pain au levain sont possibles également.

Enfin, comme apport de protéines, optez plutôt pour les viandes maigres comme le poulet, la dinde ou une source végétale comme le tofu. Le beurre de cacahuète ou la pâte d’amande constituent une bonne option. Le steak et les frites le sont moins. Encore un dernier conseil : lors d’une crise accompagnée de nombreuses diarrhées, buvez de temps à autre une boisson sportive. Une boisson énergétique hydratante contient de nombreux nutriments et minéraux que vous risquez de perdre plus rapidement en raison de la diarrhée. Ces boissons vous procurent les sucres rapides et les minéraux qui vous seront utiles en pareils moments.

Suppléments

Un régime varié, sain et nourrissant est très important pour les patients MICI. Lors des crises, ce n’est cependant pas toujours évident. Dans de telles circonstances, les suppléments peuvent également vous aider. Le calcium, la vitamine D, l’acide folique, la vitamine B12, le fer, le zinc et les vitamines A, E et K sont essentiels, en cas de crise, pour les personnes atteintes de la maladie de Crohn et de la rectocolite. En particulier, une carence en fer doit être traitée aussi efficacement que possible. Cela peut également se faire, par exemple, via une perfusion. C’est plus efficace, cela fonctionne plus rapidement et c’est mieux toléré par la plupart des patients MICI que la prise de fer orale.

Chaque patient MICI vit sa maladie de façon personnelle. Il y a autant de vécus que de patients. L’essentiel est surtout de trouver ce qui fonctionne le mieux pour vous en termes de traitement et d’alimentation. Prenez contact avec votre médecin, une infirmière MICI ou un(e) diététicien(ne) pour de plus amples informations.

Ce dossier a été réalisé en collaboration avec le Dr. Catherine Reenaers, chef de Clinique au sein du département de gastroentérologie du CHU de Liège.