Journée IBD au CHU de Liège

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Le 13 octobre dernier, le vaste hall d’accueil de l’hôpital universitaire de Liège fut le théâtre d’une journée d’information interactive sur l’IBD. L’équipe IBD de l’hôpital au grand complet, y donna des explications détaillées aux patients, visiteurs et collègues.

Les personnes de passage pouvaient également visionner, via des lunettes en 3D, une vidéo en réalité virtuelle sur l’IBD. Le stand d’information accueillait également une délégation de l’association de patients wallonne, l’Association Crohn-RCUH.

L’objectif était avant tout d’informer le grand public au sujet de l’IBD et de susciter davantage de compréhension. Mission réussie estime, Jessica Ghiotto, qui travaille à l’accueil et a testé les lunettes 3D : « Une de mes collègues souffre de la maladie de Crohn et doit faire attention à ce qu’elle mange, sous peine d’être malade. Le film explique bien ce qu’implique la maladie. Tout le monde souffre de temps en temps des intestins, mais le voyage virtuel au long de ceux-ci m’a montré à quel point ces maladies peuvent être graves et douloureuses. »

À l’écoute

C’est l’idée que l’équipe IBD souhaitait diffuser dont six membres étaient présents sur place. Nathalie Chapelier est, comme Isabelle Dury, infirmière IBD et personne de confiance. « Nous sommes les premières personnes de contact pour les patients. Ils peuvent s’adresser à nous pour de nombreuses questions. Notre tâche consiste, au cours d’entretiens avec eux, à suivre l’évolution de leur maladie. Nous discutons des différents médications et traitements, et nous aidons également à résoudre des problèmes pratiques. Où aller pour une perfusion, par exemple. »

Chaque patient est différent et demande une autre approche. Le nombre de jeunes patients, notamment, est en augmentation. Nathalie : « Les adolescents ont besoin de davantage d’explications pour comprendre leur maladie. Je suis plus attentive à la communication avec les parents, car ceux-ci ont tendance à surprotéger leurs enfants. » Leur rôle de personne de confiance est très important auprès de ce jeune groupe cible : « Des jeunes filles qui ont des questions relatives à la grossesse préfèrent souvent frapper à notre porte plutôt qu’à celle du médecin.

L’éducation des patients est également très importante en ce qui concerne la confiance dans les thérapies. Des patients en rémission peuvent avoir tendance à moins les respecter. C’est humain, mais ce n’est pas une bonne idée. Dans ce cas je cherche avec eux des solutions pour continuer à prendre leur traitement correctement. » Nathalie dirige également les patients vers l’association. « Comme je le remarque à l’hôpital, les patients ont besoin de se parler et d’échanger des conseils. »

Pour sa collègue infirmière IBD, l’attention portée aux aspects sociaux est très importante. « Nathalie et moi, nous nous complétons parfaitement. Elle a un esprit très pratique. Je me vois plutôt comme une oreille attentive, qui accompagne le patient pendant la maladie. Les patients peuvent toujours nous contacter et ils le font fréquemment à propos de questions personnelles et de choses qui les angoissent. Les questions sont également très intimes parfois : des femmes qui s’interrogent sur leur vie sexuelle avec une stomie. Il y a également des moments de grande détresse.

Une patiente aux pensées suicidaires nous a récemment appelés à l’aide, j’ai fait en sorte qu’elle puisse rencontrer d’urgence un psychiatre de l’hôpital. » Isabelle veut encore aller plus loin dans l’accompagnement de ses patients. « J’aimerais organiser des sessions d’autohypnose pour aider les patients à sortir de ce cercle vicieux de douleur, de fatigue et de problèmes psychologiques. J’ai constaté en oncologie que de telles séances rendent les patients plus forts pour reprendre le contrôle de leur vie et se sentir moins malades. »

L’arrivée prochaine de nombreuses nouvelles thérapies

La gastro-entérologue Catherine Reenaers était présente également. Elle a une formation en immunologie et a également effectué des recherches sur les inflammations rhumatologiques. « En tant qu’hôpital universitaire, nous travaillons avec des laboratoires, nous réalisons des études cliniques avec d’autres hôpitaux et nous sommes également actifs au niveau international. De nombreuses recherches cliniques sont en cours et leurs résultats vont permettre au patient de mieux maîtriser sa maladie. Cette stratégie correspond étroitement à notre vision et notre approche en tant qu’équipe. L’apparition annoncée de nombreux nouveaux traitements au cours des 5 prochaines années est une évolution très positive qui va augmenter considérablement la qualité de vie des patients. »

Des outils permettant de prendre soi-même sa maladie en main

Le département de gastro-entérologie est dirigé par le professeur Edouard Louis. Lui aussi souligne les nombreuses évolutions apportées au traitement des patients depuis 2010 et de nouveaux développements dans le futur. « La nouvelle génération de traitements permettra de travailler encore plus sur mesure pour chaque patient. Une bonne chose, car ainsi chacun obtiendra le meilleur traitement personnalisé. En tant qu’hôpital, nous misons aussi sur cette dimension : la mise en place de parcours de soins que nous aimerions voir standardiser pour chaque hôpital.

Aujourd’hui, leur mise en place relève de chaque hôpital, sur base de directives internationales, mais il serait préférable pour le patient et la continuité du traitement de voir appliqués partout les mêmes circuits et protocoles. Nous y travaillons à fond. Dans ce cadre, le rôle du patient dans la prise en main de sa maladie acquiert sans cesse davantage d’importance. Les outils à sa disposition sont de plus en plus nombreux.

Une application, par exemple, permet au patient d’effectuer lui-même certaines mesures et de les envoyer à l’hôpital. Un autre outil est le petit questionnaire que le patient remplit avant la consultation et sur lequel le médecin peut immédiatement se baser. Ces données sont également ajoutées au dossier électronique du patient, ce qui est positif en termes de suivi. » Il conclut par un appel aux patients : « Continuez à demander de nouveaux traitements à votre médecin. Au plus l’interaction entre le patient et le médecin traitant sera importante, au plus la qualité des soins sera grande et au plus ceux-ci pourront être adaptés au patient. »

Non, l’IBD n’est pas contagieuse

Trois bénévoles donnaient aux personnes intéressées des explications détaillées sur le fonctionnement de l’association de patients wallonne, l’Association Crohn-RCUH. Daniel De Bast, son président, explique : « Nous venons d’avoir la visite d’une jeune femme de 21 ans, qui se trouve actuellement dans la phase du diagnostic. Ne sachant pas encore précisément ce qu’elle avait, elle était un peu inquiète. Je l’ai rassurée en lui donnant des informations et en lui montrant qu’elle n’était pas toute seule pour faire face. La plupart des gens qui passent ici connaissent quelqu’un qui n’est pas encore au courant de notre existence. Au plus le nombre de personnes qui nous connaissent est grand, au plus notre impact peut s’avérer important auprès des pouvoirs publics, nous l’espérons en tous cas. »

Nathalie Moreau faisait également partie des bénévoles présents. « J’ai pris un jour de vacances pour être présente aujourd’hui. Je travaille à temps plein et je fais en même temps du bénévolat pour l’association et le groupe Facebook MICI Made in Belgium , que j’ai créé voici quelques années. C’est fatigant, mais il s’agit d’une ‘bonne’ fatigue. D’ailleurs, au moins j’en fais, au plus je suis fatiguée (elle rit). Si je suis tellement active comme bénévole, c’est pour montrer que la vie ne s’arrête pas si l’on souffre d’IDB. Vous n’avez pas à subir la maladie. Ici, je donne des explications à propos de l’association et aussi de la maladie. Car c’est toujours nécessaire. ‘Est-ce que c’est contagieux ?’, m’a encore demandé quelqu’un. Non, bien sûr ! »

Maïkel Honoré est le plus jeune des trois bénévoles. « Voilà environ cinq ans que j’ai appris que je souffrais de colite. Je suis encore jeune, j’ai 26 ans, et je tente de ne pas laisser la maladie déterminer le cours de ma vie. J’essaie de réaliser mes projets autant que possible. Depuis deux ans, je suis délégué régional de l’association à Liège, parce que je constate que la maladie est encore trop peu connue. Les amis ne comprennent pas pourquoi je ne peux plus sortir aussi souvent, j’ai également entendu des collègues me critiquer sur le fait que je suis malade. »

Consultation conjointe

Catherine Van Kemseke est gastro-entérologue à l’hôpital depuis 1998. « En tant que centre d’expertise, nous accueillons plus souvent des patients atteints d’une affection plus complexe. Notre approche multidisciplinaire ne se limite pas à l’hôpital. Nous travaillons également avec les médecins traitants, par exemple au niveau des vaccinations (vaccination anti-grippale, anti-pneumococcique,…). En consultation, je remarque qu’il y a encore beaucoup de malentendus à propos de l’alimentation.

Hormis en cas de poussée importante ou de lésion sténosante, nous n’imposons pas de régime aux patients. Ce qui a totalement disparu chez les collègues, c’est l’idée que l’IBD est une maladie psychosomatique. Il y a quelques dizaines d’année, cette idée pouvait être présente dans l’esprit des médecins. Depuis lors, nous avons beaucoup progressé notamment au niveau de l’origine génétique de ces maladies. Le fait que, dans leur quête d’informations, des patients écument internet ne me dérange pas, tant qu’ils viennent ensuite me voir avec leurs questions et que je puisse ainsi corriger les informations erronées. »

Sa collègue Pascale Latour se rallie à son avis. « C’est notre rôle en tant qu’hôpital universitaire de donner une explication légitimée par la science et de les diriger vers des sites fiables, tels que celui de l’association de patients. » Elle explique également leur approche multidisciplinaire. « Chaque semaine, notre équipe se réunit et, tous les jeudis, nous organisons une consultation spécifique avec tous les médecins et infirmiers IBD. Un rhumatologue est également présent. Dans l’idéal, un dermatologue et un diététicien devraient également être de la partie. Actuellement nous dirigeons encore les patients vers ceux-ci. »