« Allo, docteur ? »

ID/ Hannes Blockx

Quels sont les traitements existants pour les MICI ? Quel régime alimentaire adopter ? Quelles sont les particularités de ces maladies chez l’enfant ? Et comment faire face à la fatigue et réussir à vivre avec ? Des questions récurrentes que nombreux patients se posent et qui étaient au cœur de la matinée d’information organisée par le service de gastro-entérologie du Grand Hôpital de Charleroi Saint-Joseph.

Le 25 mars passé, le Grand Hôpital de Charleroi Saint-Joseph accueillaitour la première fois une rencontre avec les patients atteints de MICI et leurs proches. Pour cette première édition, l’accent était mis sur les interrogations les plus fréquentes en consultation et auxquelles il peut être difficile de répondre en 20 minutes, comme l’explique le Dr Nicolas de Suray : « Cette journée d’information était importante car nous avons pu ainsi rencontrer nos patients pour discuter des MICI plus longuement et dans un autre cadre que celui de la consultation classique, parfois assez contraignant. »

C’était aussi l’occasion de rencontrer leur entourage : « Très souvent, les patients viennent seuls en consultation. Leurs proches n’ont donc pas le son de cloche des médecins, ni l’opportunité de poser leurs propres questions pour comprendre pleinement en quoi consistent ces maladies et leurs conséquences sur le quotidien. À cet égard, nous sommes très heureux de voir qu’autant de personnes se sont déplacées pour assister à cette matinée, et qu’à peu près la moitié d’entre elles sont des proches de patients. »

« Quoi de neuf, docteur ?

Parmi les questions les plus souvent soulevées en consultation, celle du traitement est l’une des plus récurrentes. Le Dr Nicolas de Suray, du service d’hépato-gastroentérologie, intervient dans cette première partie pour dresser ‘l’état des lieux’ des différents traitements existants : « Il est important de rappeler que nous ne pouvons toujours pas guérir les MICI en 2023. Cependant, les recherches se sont accélérées depuis le début des années 2000, au point que nous avons désormais accès à un large panel de médicaments qui nous permettent de proposer le meilleur traitement possible aux patients, en fonction des spécificités individuelles de leur maladie. »

Il termine cependant par une recommandation : « Quel que soit le traitement adopté, l’important est de le poursuivre dans la durée. Les MICI sont des maladies chroniques, il ne faut donc pas confondre rémission avec disparition. Si vous n’avez plus de symptômes, continuez de le prendre pour éviter une nouvelle poussée. »

L’alimentation dans les MICI, un casse-tête ?

Après la question des traitements, l’alimentation est certainement LE sujet qui occupe l’esprit de nombreux patients. Dans son intervention, le Dr Guillaume Burnet, gastroentérologue, commence d’abord par remettre les pendules à l’heure : « Le lien entre alimentation et MICI est difficile à établir. À ce jour, il n’existe pas de ‘régime MICI’, de régime d’exclusion qui permettrait d’obtenir la rémission d’une maladie active. »

Mais que manger dans ce cas ? Pas la peine de se priver ! Le conseil général est d’assurer une alimentation saine, variée (légumes, fruits, poissons), pauvre en viande rouge et ‘anti-inflammatoire’, c’est-à-dire qui évite les aliments ultra-transformés (sucreries, compotes avec additifs…).

Il est aussi important de surveiller ses carences éventuelles (via une prise de sang à intervalles réguliers) car les poussées peuvent parfois être provoquées par un déséquilibre nutritionnel (carence en fer, vitamine B12, vitamine D, calcium…).

À bas le tabac

Seul facteur environnemental identifié dans la maladie de Crohn, le tabac est à éviter absolument. Guillaume Burnet : « Le tabac joue un rôle actif dans l’apparition de la maladie de Crohn, ainsi que dans les risques de poussée, d’escalade thérapeutique (chirurgie) et de complications. Il a été démontré qu’arrêter le tabac pendant un an suffisait à diminuer les risques de poussée de 65 % et permettait une désescalade thérapeutique. »

Particularités des MICI chez l’enfant

Lorsqu’on parle de MICI, on ne pense pas immédiatement à la question de l’enfance. Pourtant, comme l’explique la Dre Catherine Wanty, pédiatre, le nombre d’enfants atteints ne cesse d’augmenter d’année en année.

La maladie est-elle différente chez nos petits bouts de chou Catherine Wanty explique : « Une MICI chez un enfant partage certaines similarités avec celle d’un adulte. Cependant, certains symptômes lui sont spécifiques, comme une interruption de la croissance, des symptômes extra-intestinaux (aphtes, douleurs articulaires…) qui peuvent survenir des années avant que n’apparaissent les symptômes digestifs, ou encore un retard dans le développement de la puberté. Lorsque nous traitons un enfant, nous visons non seulement la résolution des symptômes et le maintien de la rémission et d’une qualité de vie satisfaisante, mais aussi à préserver la croissance staturo-pondérale et le développement pubertaire de l’enfant jusqu’à ce qu’il arrive à l’âge adulte. »

Fatigué d’être fatigué

L’un des éléments prépondérants d’une MICI est la fatigue qui l’accompagne. C’est une composante de la maladie souvent sous-estimée, car il s’agit d’une expérience subjective, sans visage et qui présente des symptômes multiples comme l’irritabilité, le manque d’énergie« Et pourtant, c’est une compagne de tous les instants pour de nombreux Belges, le véritable mal de notre siècle », indique Laurent Moor, coach mental & santé à la Clinique de la Fatigue à Liège. Il poursuit : « La fatigue est une sensation d’épuisement que ni la sieste, ni le repos ne viennent apaiser, ainsi qu’une incapacité à mener des actions de manière volontaire, par manque d’énergie. »

Mais dès lors, comment la traiter ? Après avoir établi le diagnostic (mesure du degré de fatigue) et le profil du patient fatigué, puis identifié les causes et conséquences (charge mentale, déconditionnement physique, médication, détresse psychologique, troubles alimentaires et du sommeil…), l’objectif est de mettre en place des solutions adaptées à chacun et dans tous les aspects de la vie, par exemple : gestion des émotions et du sommeil, mettre le corps en mouvement, se connecter à la nature, mettre en place des activités ludiques, faire des pauses de 15 minutes toutes les heures et demi, prévoir 1 heure par jour et une demi-journée par semaine rien que pour soi…

Besoin d’aide? L’ASBL Crohn RCUH est là pour vous

La matinée d’information s’est terminée par la présentation de l’association de patients Crohn-RCUH par Katleen Franc, sa présidente, et Daniel De Bast, son ancien président. Son but ? Apporter aux patients par divers moyens, une information générale sur leur maladie, et les représenter auprès du monde politique, d’instances officielles comme l’INAMI ou d’autres organismes (médecins, firmes pharmaceutiques…), et du grand public.

L’association a ainsi mené différentes actions concrètes, comme la création du pass-toilette qui permet à son détenteur d’avoir un accès gratuit aux toilettes d’un établissement public ou de l’HORECA, ou encore le plafonnement des primes d’assurance-vie et solde restant dû.

Vous vous posez des questions sur votre maladie qui dépassent le cadre d’une consultation médicale ? N’hésitez pas à consulter l’un des différents canaux de l’association comme la revue semestrielle CROHNIQUE, le site www.mici.be et sa page Facebook, à participer aux journées d’information et/ou à faire appel aux permanences téléphoniques organisées par province et assurées par des bénévoles eux-mêmes atteints de MICI.

Cette année marquera également le début des groupes de parole qui seront animés par deux psychologues elles-mêmes patientes pour discuter de nombreux sujets qui impactent la vie quotidienne. Et si vous avez besoin d’un avis médical supplémentaire, rassurez-vous : l’ASBL se distingue par son comité médical et scientifique qui vérifie l’exactitude des informations proposées.